C’est un amour qui ne ressemble à
aucun autre. L’amour entre une mère et son fils. Alors lorsque la maman de Guillaume dit : « Les garçons et
Guillaume, à table ! », il n’est d’emblée pas considéré comme un
garçon… donc, il est une fille. Il en est persuadé. Sinon, pourquoi sa mère
ferait-elle le distinguo ?
Non, il n’est pas homosexuel,
contrairement à ce que pense son entourage. Il aime les garçons, mais c’est
normal, vu qu’il est une fille. Lorsque son père lui reproche de ne pas
pratiquer de sport, Guillaume dit qu’il veut faire du piano. A l’opposé de ses
frères, il n’aime pas la chasse, a peur des chevaux. Il passe donc la majorité
de son temps avec sa mère. Ce modèle inaccessible. Cette figure maternelle qu’il
prendra soin d’imiter jusque dans les moindres détails, provoquant de ce fait
quelques quiproquos.
Cette maman distante et autoritaire dont il cherchera en
permanence les faveurs, les signes de reconnaissance et de fierté, qu’il
ménagera afin de ne jamais la décevoir.
Les garçons et Guillaume, à table !
est bien plus qu’une simple comédie. C’est un regard sensible, drôle, sur une
adolescence tourmentée, une quête de l’identité sexuelle. Guillaume Gallienne,
qui tient son propre rôle, et également celui de sa mère, pose également un regard
critique sur l’homophobie, sa bêtise et son ridicule. Gallienne a également
cette énorme capacité de revenir sur des éléments, a priori traumatisants, avec
humour, recul et intelligence.
C’est en 2008 que Guillaume
Gallienne crée « Guillaume et les garçons, à table ! ». Un
one-man show où il interprète tous les rôles. La pièce est reprise en fil
rouge. Les souvenirs sont mis en images, les situations recréées. La mère
surgit à n’importe quel moment, dans les situations les plus incongrues. A l'image du coryphée du théâtre grec antique, elle commente chaque malaise que ressent son fils,
donne l’explication aux gênes rencontrées, le tout avec un cynisme glaçant.
« Ce qu’on te reproche,
cultive-le ! C’est toi. » Cette citation de Cocteau, Gallienne la
fait sienne. Alors que ses frères se moquent de son côté efféminé, Guillaume s’amuse
à jouer à Sissi la nuit, avec une couette attachée à la taille qui devient robe
à crinoline… Sa majesté reçoit dans son boudoir. Surpris par son père, il
invoquera un chauffage déficient. En permanence en quête de qui il est
vraiment, Gallienne romance quelque peu son adolescence et sa vie de jeune
adulte, mettant en scène des situations cocasses, changeant de points de vue
(sa mère, sa tante, etc…). Cette histoire est devenue drôle
et un peu surréaliste même. « Un
surréalisme qui me fait passer d’un âge à un autre, d’un sexe à un autre, d’un
décor à un autre, avec un seul impératif : aller au bout, et qu’on me
croit. Pour raconter comment, d’illusions en désillusions, j’en suis arrivé là.
Avec le plaisir cinématographique de pouvoir transformer instantanément le
plateau en autant de lieux évoquant les épisodes les plus frappants de cette
odyssée », tels sont les mots de Galienne.
Les garçons et Guillaume, à table !
est un film drôle et touchant. On rit de bout en bout, tout en ayant à l’esprit
que cette démarche, honnête et profondément sincère, lève un bout du voile sur
ce que peuvent ressentir celles et ceux qui se cherchent sexuellement. C’est
aussi un film-déclaration d’amour : aux femmes, modèles et sources d’inspiration,
et à la mère. Première femme de leur vie et premier amour inconditionnel de ces
petits garçons qui n’auront de cesse de chercher dans leurs compagnes soit son
double, soit son contraire. Dans la famille Freud, je demande le fils :
Sigmund. Nul doute que le plus célèbre des psychanalystes se serait délecté d’une
telle histoire.
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