lundi 12 août 2013

#Locarno66: épisode 5


Grande journée que celle d’aujourd’hui.  J’ai pu voir, en séance de presse, deux films pour lesquels je me réjouissais tout particulièrement : Tableau noir d’Yves Yersin et L’étrange couleur des larmes de ton corps  d’Hélène Cattet et Bruno Forzani. Ni l’un ni l’autre ne m’ont déçue. Je vous en parlerai demain, lorsque les festivaliers auront eu l’occasion de le voir. Pas de Cukor aujourd’hui, mais un film d’Otar Iosseliani, Brigands, chapitre VII. Iosseliani est un réalisateur géorgien qui viendra s’installer en France au début des années 80. Son travail jusqu’au moment de son exil sera très souvent confronté aux rigueurs et à la censure du régime communiste. Son dernier film, sorti en 2010, Chantrapas, a été relativement mal accueilli et par le public et par la critique spécialisée. Il n’en reste pas moins que Iosseliani est un des réalisateurs parmi ceux qui comptent. Comme le dit Carlo Chatrian, directeur artistique du Festival del Film Locarno : « Les films de Iosseliani sont, jusqu’à la façon dont ils sont produits, des hymnes à la liberté. Liberté de regarder le monde avec un regard indépendant et d’y projeter une ironie sublime, incomparable, qui permet de relancer le point de vue et de remettre en discussion la vision choisie. Parce que même quand le film est fini, la ronde de la vie peut continuer. »
 
Otar Iosseliani
 
Brigands, chapitre VII entre bien la définition du cinéma de Iosseliani qu’en fait Chatrian. Le burlesque est omniprésent, la liberté également. Il nous emmène d’une époque à une autre, du roi jaloux qui fait décapiter sa reine parce qu'elle a ouvert sa ceinture de chasteté au père membre du régime communiste qui initie son fils aux techniques de tortures, le film de Iosseliani respire l’ironie et la liberté de ton, non sans faire grincer des dents de temps à autre. Sorti en 1996, il avait été qualifié à l’époque par les Inrocks de la manière suivante : « Nous aimons plus que de raison le cinéma burlesque et délicieusement cruel de ce Géorgien décalé, poétique, politique, ironique. Iosseliani est un doux enragé mais surtout un incroyable séducteur. Si vous n’avez pas succombé à son charme, c’est tout simplement que vous n’avez jamais rencontré un seul de ses films. ».  Je ne peux que rejoindre cet avis.
 
 

Je suis heureuse de pouvoir vous parler de mon gros coup de cœur pour un film de la compétition internationale : Short Term 12  de Destin Cretton. Quel film remarquable. Quelle intelligence. Brillant sur tous les plans. C’est le deuxième long métrage de ce réalisateur hawaïen. Au départ, il s’agissait d’un court qui a été récompensé au Festival de Sundance en 2009 puis qui a été présélectionné aux Academy Awards en 2010, pendant que son premier long I’m not a Hipster faisait sa première à Sundance. Un réalisateur qui commence à s’imposer dans le circuit du cinéma indépendant américain. Le succès de la version courte de Short Term 12  incita le cinéaste à en tourner une version longue, pour notre plus grand bonheur. Short term12, c’est le nom d’un foyer qui accueille des jeunes difficultés. Grace, une jeune éducatrice, y travaille, entre rigueur et complicité. Lorsque Jayden débarque au Foyer, Grace se retrouve confrontée à des problèmes qui ont jonchés sa propre vie. La très proche remise en liberté de son père, ainsi que sa grossesse, ne vont pas arranger les choses. Elle va devoir trouver un équilibre entre sa vie personnelle, son travail, et trouver, à travers l’humour et l’espoir, des solutions pour avancer dans sa vie de femme et de future mère. Un must de cette 66ème édition où la pudeur, aussi étrange que cela puisse être, est la clé qui ouvre les portes de l’âme humaine. Enorme coup de cœur.
 
 

Dans la section Cineasti del presente, Costa da Morte  de l’espagnol Lois Patiño est une merveille. Costa da Morte, c’est une région de l’Espagne, la Galice, qui du temps de l’époque romaine était considérée comme le bout du monde. Les paysages sont hachurés, la mer a provoqué de nombreux naufrages, l’ambiance y est brumeuse et tempétueuse. C’est en mettant en lumière les relations contradictoires entre les pêcheurs, les artisans et les éléments qui les entourent, que Patiño dresse un portrait de cette région. Tendre et délicat, un voyage au cœur d’une région faite de légendes.
 
 
 
Et pour ceux qui sont dans les parages de la Piazza Grande, ne ratez pas demain lundi à 14h à La Sala, « Bonne Espérance » de Kaspar Schiltknecht. Vous le retrouverez demain, ainsi que Céline Cesa, comédienne, dans un entretien qu’ils m’ont accordé.

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