dimanche 17 mars 2019

FIFF 2019 : du sordide au sublime

Presqu'une année d'absence. Quelques posts sur les réseaux sociaux, des micro-critiques çà et là...

La remarque de deux dames croisées dans les toilettes du cinéma Rex - ne jamais sous-estimer les toilettes des dames, c'est un lieu de rencontres et d'échanges phénoménal - m'a profondément touchée. Elles ont parlé de moi quelques jours avant le début du festival, en préparant leur programme. Elles se demandaient si j'écrivais encore. Oui! Ailleurs, différemment, mais oui! Alors mesdames, vous qui allez certainement lire cette bafouille, je vous embrasse! Je me sens moins seule devant mon écran. La tenue d'un blog est chronophage, est un travail de solitaire, et parfois, la vie reprend un peu ses droits et nous éloigne de l'ordinateur... et ce n'est pas plus mal. Cela me permet de revenir fraîche et forte des expériences emmagasinées durant cette année. Mais assez parlé de moi, place à ce qui nous réunit ici, le cinéma!


Mon badge autour du  cou, le sourire aux lèvres, mon programme sous le bras, c'est sifflotante que je me suis dirigée vers la première séance de la journée: PEACE AFTER MARRIAGE de Bandar et Ghazi Albuliwi. On nous promettait une espèce de Woody Allen sur fond de problème israélo-palestinien... mouais... Pour ne rien vous cacher, et comme à mon habitude, je vais être très directe, je me suis ennuyée. Si on considère un ou deux gags de bonne facture, le reste du film est une succession de clichés insupportables! Le scénario est tellement maigre qu'à chaque fois que les réalisateurs ne savent plus comment se sortir d'une situation sordide, ils sortent un gag sur les homosexuels ou un autre cliché stupide. C'est lassant et sincèrement, je n'ai très vite plus eu envie de sourire. Constat implacable: nous étions donc en présence de la quintessence de la comédie de beauf. Le même niveau insupportable d'un QU'EST-CE QU'ON A FAIT AU BON DIEU?  Si au moins il y avait un soupçon d'humour noir dont je suis friande... mais non! Et là, je m'insurge! Présenté dans la section Cinéma de Genre: la comédie romantique, PEACE AFTER MARRIAGE est absolument tout ce que je peux reprocher à la comédie romantique de bas-étage: niais et lourd. Je ne comprends pas ce que ce film fait ici. Vous l'aurez compris, ce film est totalement dispensable. Cette section regorge de petites perles, vers lesquelles je vous invite à vous diriger. Et du soi-disant rapprochement avec Woody Allen, je ne retiendrai que le poster d' ANNIE HALL, le jazz et New-York. Voilà.


Si la journée a démarré sur un goût amer, elle a cependant réservé de très jolies surprises et on a frôlé le sublime...


THE THIRD WIFE d'Ash Mayfair, premier long métrage de cette réalisatrice vietnamienne née en 1985 (!) est d'une beauté affolante. Tout dans ce film est parfait: la photographie, les cadrages, les costumes, les décors, le scénario, les actrices... absolument TOUT! Une utilisation adéquate des allégories qui fait penser à certains chefs-d'œuvres de Terrence Malick, une connexion homme-nature bouleversante. C'est un film élégant et sensible qui conte l'histoire de May, jeune fille de 14 ans qui se retrouve mariée à un riche propriétaire terrien. Elle est la troisième femme de cet homme et devient rapidement sa favorite.




Nous sommes à la fin du XIXe siècle, au Vietnam. Les femmes sont complètement assujetties et ne sont là que pour satisfaire leur homme et sont considérées par leurs pères, comme une monnaie d'échange qui leurs permet d'engranger de jolies dots. Ceci étant posé, ce film va très certainement interroger de nombreuses femmes, et je l'espère aussi certains messieurs, sur la place que tenait et que tient encore la femme dans certaines cultures. Au-delà de ça, c'est avec une finesse absolue que la réalisatrice dresse le portrait non-seulement d'une société vietnamienne patriarcale, nous sommes au XIXe siècle, ne l'oublions pas, mais également de la jeune May qui dans un premier temps découvre la sexualité dans la souffrance, et qui peu à peu, confrontée à certains événements, va découvrir d'une part le plaisir, le désir, la faculté de dire "non" et le dur rôle de mère.  C'est sublimissime! A voir donc, de toute urgence!






JINPA de Pema Tseden est quant à lui le premier OFNI - objet filmique non-identifié - de la compétition longs métrages. Filmé en carré, ce que j'adore, produit par Wong Kar-Wai, que j'adore tout autant, c'est une histoire étrange où passé et présent se mélangent agréablement et où, en tant que spectateur, nous sommes totalement emportés dans un univers qui, au départ nous échappe un peu voire nous perd,  puis nous enveloppe complètement. Il s'agit d'un conte moderne, où toute la sagesse tibétaine nous prend par la main, sur la vengeance et la rédemption. Non dénué d'humour d'ailleurs. C'est un mélange de genres également: on passe allégrement du road-movie au western - la salle a d'ailleurs sourit lors d'une scène absolument fantastique d'entrée dans un bar qui nous rappelle Sergio Leone, en passant par la science-fiction. Oui, oui, la science-fiction. JINPA, c'est une expérience. Et je vous suggère de la vivre sans a priori, avec la curiosité qui vous caractérise, n'est-ce pas? Pour ma part, je sais déjà que je vais aller le revoir, c'est certain. Ne reste plus qu'à le caser dans mon programme... ça, c'est une autre histoire qui relève de la quadrature du cercle.






Une petite bière plus tard - oui, parce qu'il ne faut pas se laisser aller - je me suis dirigée vers les Caraïbes. La section Nouveau Territoire m'a complétement fascinée cette année. J'ai pratiquement sélectionné tous les films de la section. C'est simple, j'ai envie de tous les voir. J'ai donc commencé par celui qui m'intriguait le plus: WOODPECKERS du réalisateur dominicain José Maria Cabral. Dans un univers carcéral hostile, hommes et femmes se côtoient à travers les grilles. Les histoires d'amour naissent, les petites culottes et les mots doux s'échangent, sous le regard intransigeant des gardiens. Les prisonniers ont inventé un langage des signes qui leur permet de communiquer au-delà des grilles. Les mots d'amour fendent les airs, les jalousies s'aiguisent. Nous sommes malgré tout dans un univers violent, on ne va pas se mentir, mais cet amour qui flotte rassure et met du baume au cœur. J'ai profondément aimé ce film, qui m'a cependant quelque peu déçue sur les 10 dernières minutes. J'aurais aimé, mais c'est un goût tout personnel et pas du tout un reproche, que la fin soit plus ouverte. C'est une fin un peu "téléphonée". Un petit peu. Et ça a laissée la grande romantique que je peux être, parfois, un peu sur sa faim. Mais c'est un détail, car le film, mis à part les deux protagonistes principaux, est porté par de vrais détenus, ce qui lui confère une force rare.








ST / 17 mars 2019













1 commentaire:

  1. bonjour Stéphanie
    MERCI! Je suis heureuse de vous retrouver et partager vos émotions durant cette intense semaine du FIFF. Et merci pour le clin d'oeil .
    J'ai adoré "the third wife"et lu avec plaisir vos textes .
    Je vous embrasse moi aussi.
    Claudine

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