vendredi 3 janvier 2014

NYMPHOMANIAC VOL.1 - Lars von Trier - 2014

Autant je déteste le personnage Lars von Trier, autant je suis une inconditionnelle de ses films. C'est là un de mes nombreux paradoxes. Et pour tout vous dire, la dernière fois que je suis sortie d'une projection blanche comme un linge, les jambes chancelantes, c'était il y a un peu plus de 2 ans: Cut d'Amir Naderi. Jusqu'à ce soir.
 
Je ne reviendrai pas sur tout le bazar qui a précédé la sortie du film. Premièrement, je ne l'ai que peu suivi et deuxièmement, cela n'apporterait rien à ma chronique. Tout ce Barnum n'aura apporté que de la déception à de trop grandes attentes. Pas de déception pour moi, donc.
 
Ce film, divisé en huit chapitres - cinq sont présentés dans le volume 1 - revient sur la vie d'une femme  auto-diagnostiquée nymphomane, Joe (Charlotte Gainsbourg). Cette dernière est retrouvée le visage et le corps meurtris dans une rue par Seligman (Stellan Skarsgard). Il ne faut ni appeler une ambulance, ni la police : la douleur elle connaît. Finalement, il la recueille chez lui. Joe raconte son histoire et ce qui l'a menée, selon elle, à être un mauvais être humain.
 
De la découverte de sa nymphomanie, à sa défloration purement technique (trois fois devant, cinq fois derrière), aux paris sordides avec son amie B, en passant par la valse des amants qui se succèdent à une heure d'intervalle, Joe confiera tout. Incapable de ressentir quoi que ce soit, sauf pour son père, elle enchaîne les expériences sexuelles, traitant les hommes comme de vulgaires objets n'existant que pour satisfaire ses désirs, et non ses besoins. Elle fait clairement le distinguo, se distançant par là de l'addiction. Cette frénésie sexuelle n'est pas accompagnée de culpabilité, loin s'en faut! Joe substituera même un mea vulva, mea maxima vulva au très chrétien mea culpa, mea maxima culpa.
 
Au fil du discours, nous sommes frappés par la solitude qui entoure cette jeune femme. Le néant nous aspire avec tellement de force, que nous sommes littéralement vidés de notre substance vitale.
 
 
 
Celles et ceux qui s'attendaient à voir des scènes pornographiques seront profondément déçus. En effet, même si le sexe, et son pouvoir, est un thème central, les scènes explicites sont rares et très pudiques. Après, ce que moi je juge pudique, ne le sera pas forcément pour quelqu'un d'autre. Je vous laisserai seuls juges de cela.
 
Lars von Trier est, une fois de plus, un réalisateur, non seulement génial, mais également très habile. C'est un écran noir de plus de 20 secondes qui nous accueille. Une bande son très discrète: quelques gouttes d'eau... il cherche à développer nos sens en dehors de celui de la vue. Et ça fonctionne. Lorsque la caméra effleure les murs ruisselants, on a le sentiment de les caresser avec nos mains. Il en va de même avec la jeune Joe que l'on a l'impression de découvrir du bout des doigts. Très troublant. Il nous manipule avec un talent certain et transfert, sur nous, les émotions que Joe est incapable de ressentir. Un coup de génie, mais qui ne nous laisse pas indemnes.
 
Le sexe, un sujet récurrent chez von Trier. Dans le très controversé Antichrist ,  le sexe extrême était une des seules façons pour que les protagonistes se sentent vivants et arrivent à surpasser la culpabilité liée au décès accidentel de leur enfant. Le "Blümchensex" n'existe pas chez Lars von Trier, même si une petite phrase bien pensante ponctue tout de même le premier volume de Nymphomaniac :"L'ingrédient secret du sexe, c'est l'amour"
 
A relever la performance d'Uma Thurman en femme trompée. Un pur régal. Humour noir, cynisme au rendez-vous. Vous allez vous délecter. Je n'en dis pas plus.
 
 
 
Derrière ce titre sulfureux se cache surtout une maladie: la nymphomanie. Cette pathologie n'a absolument rien de sexy et plonge les personnes qui en souffrent dans un profond désarroi. Bien souvent associée à un trouble bipolaire, les personnes atteintes de nymphomanie alternent les phases maniaques et les phases de dépression profonde. Cette souffrance ressort très fortement dans le film de von Trier et laissera certainement sur le bas côté ceux qui s'attendaient à voir un film excitant au possible. La seule scène excitante est lorsque Joe parle de son cantus firmus. Je vous laisserai découvrir.
 
A noter que le film (volume 1 et 2) est projeté dans sa version "censurée" de 4 heures. La version intégrale dure 5 heures 30. Le générique de fin nous propose de voir des extraits du volume 2. Rien de rassurant, un peu trop racoleur à mon goût, mais indéniablement une envie d'y retourner. Je crains que nous y laissions quelques plumes. Le fait que le film soit en deux parties est pour moi une chose regrettable. J'ai un peu peur qu'il perde en cohérence en étant fractionné de la sorte. Mais tout cela se vérifiera le 29 janvier, date de sortie de la deuxième partie. Je serai au rendez-vous. Et vous?
 
 
 
 
 
ST /03.01.14
 
 
 
 

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