vendredi 22 juin 2012

HASTA LA VISTA - Geoffrey Enthoven - 2012

Un film qui débute sur deux jeunes femmes qui font du jogging: plein feux sur leurs attributs qui dodelinent au rythme de leurs foulées. On pouvait presque craindre le pire. Et bien non, c'est le meilleur que nous a donné Geoffrey Enthoven avec son magnifique film "Hasta la vista".

Philip, Lars et Jozef: tous trois ont une particularité. Philip est tétraplégique, Lars paraplégique et Jozef est aveugle. Ils aiment le bon vin et... les femmes. Aucun d'eux n'a encore connu le plaisir que procure une relation intime. Ils en rêvent. Philip apprend par hasard qu'il existe en Espagne un endroit où de très belles femmes vendent leurs services spécialement à des personnes comme eux. Il convainc ses amis de partir. Mais lorsque deux jeunes hommes en fauteuils roulants et un aveugle décident de partir en voyage, cela demande un peu d'organisation. Cela demande surtout de persuader leurs proches de les laisser partir sans eux, non sans mentir un peu: ils suivront une route des vins.

Quelques jours avant le départ, l'état de santé de Lars de détériore. Le voyage est annulé. Mais Lars, refusant de rester puceau, souhaite que le voyage soit maintenu. L'infirmier qui devait initialement les accompagner, leur recommande Claude. Claude fera le voyage avec eux jusqu'à Punta del Mar. C'est donc en douce, et avec la complicité de la petite soeur de Lars, que nos trois loustics prennent la poudre d'escampette direction "El Cielo", le lupanar espagnol.

Mais Claude, n'est pas un garçon. Claude est une femme, bien en chair, et aux manières un peu rustres. Elle parle le français, contrairement à ces trois messieurs qui parlent flamand. Persuadés qu'elle ne comprend pas un mot de flamand, ils parlent d'elle avec des mots très durs et méprisants. Mais les événements s'enchaînant, ce quatuor va finalement trouver un modus vivendi. Ils vont se découvrir petit à petit, s'apprivoiser, se respecter.  S'aimer? Peut-être...




Ce film parle du désir, de l'amitié, de l'amour, et du besoin d'indépendance. Ils découvriront que cette indépendance tant désirée présente également des limites et des restrictions. Ce film parle aussi de ces corps qui ne sont touchés que lors d'actes médicaux ou machinaux qui les soulagent dans leur quotidien. Ces corps meurtris qui ont aussi besoin de douceur, de caresses, de sexualité. Bien sûr, il y a quelques lieux communs, mais on les oublie vite.



Inspiré d'une histoire vraie (celle d'Asta Philpot), ce film ne génère à aucun moment une gêne. Il est fait avec pudeur et justesse. Par moments, le personnage de Philip est tellement abjecte et méprisant, qu'on en vient à oublier son handicap et à le considérer comme tout homme valide qui aurait ce genre de comportement: comme un imbécile égocentrique. Mais on finit par s'attacher à lui tout de même, ainsi qu'au reste du quatuor. Robrecht Vanden Thoren (Philip), Gilles de Schryver (Lars), Tom Audenaert (Jozef) et Isabelle de Hertogh (Claude) sont tous remarquables.

Briser un tabou: voilà ce qu'a fait Geoffrey Enthoven. Porter un sujet aussi casse-gueule que la sexualité, qui plus est tarifée, des personnes en situation de handicap sur grand écran, le faire avec respect, humour et délicatesse, ce n'était pas gagné d'avance. Le pari a été relevé haut la main par ce réalisateur belge. Un road movie aux allures de rite initiatique.


Votre Cinécution

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