lundi 5 mai 2014

HER - Spike Jonze - 2014




 
De Spike Jonze, j’aimais deux choses : Being John Malkovich qu’il a réalisé en 1999 et Synedoche New-York qu’il a produit en 2008 (surtout parce le regretté Philip Seymour Hoffman y interprète Caden Cotard). Sinon, les Jackass I, II, et XXVIII  (y en a-t-il vraiment eu 28 ? NON ! et heureusement !) et autres débilités, n’ont trouvé que peu d’indulgence à mes yeux.

Mais alors pourquoi suis-je allée voir HER ? Pour Joaquin Phoenix, voyons ! Oui, quelques fois mon côté midinette se réveille et la perspective de passer presque deux heures en compagnie du beau, et si merveilleusement imparfait Joaquin, ne me laisse pas de marbre.

 
 
Dans un futur proche, Theodore (Joaquin Phoenix) vit des moments difficiles. Il vient de se séparer de sa femme et la procédure de divorce ne s’annonce pas très joyeuse. Le quotidien de Theodore consiste à rédiger des lettres à l’allure manuscrite pour des gens qui ne savent plus écrire par eux-mêmes. C’est le genre de chose qui, pour moi, grande amatrice d’échanges épistolaires, est un véritable crève-cœur. Theodore relève ses mails, repousse les rendez-vous avec ses amis – quand il ne les annule pas – et joue à un jeu holographique vulgaire et grossier, le soir chez lui. Palpitant...

Un jour, Theodore découvre un nouveau logiciel d’exploitation qui, une fois qu’il a récolté un minimum d’informations, propose une voix qui gère tout le poste et qui est censée vous correspondre. Courriels, appels, rendez-vous, tout. Cette voix (celle de la troublante Scarlett Johansson) le réveille aussi le matin et lui souhaite une bonne journée. Le reste du temps, Samantha, c’est son nom, discute, rigole et joue un peu au psy avec Theodore. Son humour et sa « personnalité », créés sur mesure, font des miracles. Theodore retrouve goût à la vie petit à petit. Et aussi étrange que cela puisse paraître, cette intelligence artificielle est capable d’éprouver des sentiments. De séances de sexe virtuelles en gros fous rires, Samantha et Theodore tombent amoureux. Oui, c’est étrange, mais on y croit.
 
 

Bien plus qu’une bluette perdue dans le paysage des comédies romantiques, HER est une représentation de notre façon de communiquer, de tomber amoureux. L’abondance des réseaux sociaux, des sites de rencontres, l’immédiateté avec laquelle s’installe l’intimité virtuelle entre deux correspondants parlent certainement à bon nombre d’entre nous. Cette pseudo aisance instantanée contraste avec la difficulté qu’ont les gens à exprimer leurs émotions et l’obligation pour eux de passer par un tiers (en l’occurrence Theodore) pour souhaiter un joyeux anniversaire de mariage, pour déclarer leur flamme ou simplement remercier les personnes qui partagent leurs vies. C’est le paradoxe de notre époque : nous n’avons jamais eu autant de moyens de communication et nous n’avons jamais été aussi seuls.

Au-delà de ce premier degré d’analyse, plus évident, on peut aisément considérer cette relation entre Theodore et Samantha comme une métaphore du processus de deuil. En effet, Theodore qui vient de se séparer de sa femme doit faire le deuil de la vie à deux et réapprendre à vivre seul. Chacun de nous a déjà vécu ces moments où la solitude pèse, mais où, pour rien au monde, on ne souhaite « remettre le couvert ». Pour se sentir vivant, on collectionne les conquêtes (Theodore a plusieurs rendez-vous), on cherche à plaire et à faire l’amour. Theodore le dit clairement à un moment. Il voulait que cette femme rencontrée un soir, le « baise », pour « combler ce petit trou dans le cœur ». La relation avec Samantha a l’avantage de ne nécessiter aucun engagement. Il sait qu’il peut plaire. Il reprend confiance en lui et en l’avenir. A la fin du processus, au moment où il est prêt à redémarrer une relation, les béquilles s’envolent… Theodore peut jouir à nouveau de la vie. Seul.
 
 

HER est un film touchant, qui nous parle certainement à tous. Malgré qu’il se passe dans le futur, les effets spéciaux sont minimes et l’on peut sans autre se projeter dans cette société finalement pas si éloignée de la nôtre. Tout est assez plausible et on y croit aisément. Regardez nos smartphones : il ne leur manque que la parole ! Un film rempli de charme et non dénué de fraîcheur.

 
 
 
 
ST/ le 5 mai 2014

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