Il y a comme un sentiment de
superficialité, de « vite fait sur le gaz », qui subsiste à la
sortie de Grace de Monaco d’Olivier Dahan, film qui a été projeté en
ouverture du Festival de Cannes.
Cela fait 5-6 ans que Grace Kelly
est devenue Son altesse sérénissime la princesse Grace de Monaco. Elle a déjà
donné naissance à Caroline et à Albert. Elle a abandonné sa carrière d’actrice,
pourtant couronnée de succès et récompensée par un Oscar pour son rôle de
Georgie Elgin dans The Country Girl de
George Seaton en 1954. Ses journées sont longues au Palais, et Rainier, son
prince charmant, est occupé par des soucis diplomatiques. C’est alors qu’Hitchcock,
avec qui elle a déjà tourné trois films, lui propose le rôle de Marnie dans Pas de Printemps pour Marnie.
Un rôle écrit pour elle. Dans un premier temps elle accepte, puis déclinera l’offre.
Ce sera finalement Tipi Hedren qui interprétera Marnie. Grace, qui ne maîtrise
ni la langue de Molière, ni le protocole lié à son rang, se retrouve
régulièrement en fâcheuse posture, du moins c’est ainsi que nous la montre
Dahan. Son élégance, sa détermination à entrer dans le rôle qui sera celui de
toute une vie, princesse, feront de Grace de Monaco une personnalité au
rayonnement mondial et un atout de taille et de charme pour la principauté.
Olivier Dahan, dont c’est le
deuxième biopic, hésite en permanence. Il hésite sur ses cadrages, sur son
style. Les lumières sont confuses : tantôt l’image est baignée de lumière
et on a l’impression que tout cela n’est pas réel ou alors c’est sombre et on
croit à un mauvais thriller politique. On navigue entre un cinéma très arty – les gros plans décadrés de Nicole
Kidman lors de son entretien intime avec Tuck, le curé de Monaco – et les
réminiscences d’un cinéma hitchcockien, notamment le passage où Grace dévale les routes
de Monaco. Tout cela crée la confusion. Dahan essaie de faire passer le prince
Rainier (Tim Roth à côté de la plaque) pour un être aussi charismatique que JFK.
En vain. Les personnages secondaires – La Callas, Aristote Onassis, Hitchcock –
sont pathétiques. Totalement désincarnés.
Je n’ai pas compris les intentions
de Dahan. Est-ce de la fascination pour le mythe Kelly ? Ou une volonté d’écorcher
le conte de fée ? Si, et je cite le film « dans un palais aussi grand il arrive que l’on se perde de vue »,
dans un film comme celui-là aussi. On perd tout de vue.
Quant à Nicole Kidman, bien que
ses traits, trop scalpelisés à mon goût, soient aussi fins que ceux de Grace
Kelly, malgré son port de reine, malgré sa silhouette, malgré sa blondeur
vénitienne, il lui manque une chose élémentaire : la chaleur qui se
dégageait du regard de Grace. Une personnalité enveloppante, spontanée et
chaleureuse. Tout cela est trop lisse… trop faussement parfait, trop
artificiel. Et le talent de l’actrice australienne se noie dans l’incertitude
de son réalisateur.
Dommage… En se concentrant sur
une période diplomatiquement délicate pour Monaco, et un épisode décisif de la
vie d’une femme, Dahan aurait pu faire ressortir de façon pertinente, et
nettement moins machiste, les enjeux et les décisions fondamentales auxquels
Grace Kelly a dû faire face le jour où elle a débarqué du paquebot Constitution
pour épouser son charming prince .
ST/ 24 mai 2014
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