samedi 1 septembre 2012

BREEZY - Clint Eastwood - 1973

Alors que Clint Eastwood met ses fans quelque peu mal à l'aise en s'adressant, dans un monologue un peu confus, à une chaise vide, censée représenter Barack Obama, lors de la convention républicaine à Tampa, et que les réseaux sociaux s'affolent, je crois qu'il est temps de remettre les ponts au milieu du comté de Madison, la douche au milieu du vestiaire ou encore Blondin au milieu du désert! Remettons les choses à leur place... déjà que "Citizen Kane" n'est plus le meilleur film au monde (!), laissons à Eastwood les talents de comédien et réalisateur qui sont les siens!
Si certains dérapages sont inadmissibles, tel celui de Lars von Trier à Cannes en 2011, et il s'agit là d'un cas extrême, les tendances républicaines de Clint Eastwood ne sont pas nouvelles et on n'est pas en train de parler d'un parti d'extrême droite ou de propos néonazis...


Ce n'est pas la première fois qu'Eastwood est attaqué de front: Spike Lee l'avait vertement apostrophé pour "Mémoires de nos Pères", lui reprochant l'absence de soldats afro-américains dans son film, laissant sous-entendre un certain racisme de la part d'Eastwood. Mais c'est oublier que le même Eastwood a réalisé un magnifique film sur Charlie Parker, "Bird"! Ou en 2008, "Gran Torino". Même si au départ le personnage de Kowalski est profondément raciste, il évolue et devient tolérant et va même jusqu'à payer de sa vie pour que justice soit faite. Et c'est sans parler d'"Invictus" en 2009. Eastwood raciste?  Je ne le crois pas.


Ambigu, Eastwood? Peut-être. Sûrement. Sa filmographie en tant que réalisateur le prouve. Il s'est attaqué à des sujets aussi troublants que dérangeants tels que : les abus sexuels sur les enfants avec les traumatismes qui s'en suivent dans " Mystic River", la boxe féminine et l'euthanasie avec "Million Dollar Baby", l'adultère avec "Sur la Route de Madison", le double regard sur la bataille d'Iwo Jima qui opposa les américains aux japonais avec "Mémoires de nos Pères" et "Lettres d’Iwo Jima",  ou encore les amours particulières dans "Breezy", le film dont je vais vous parler.



Résumer Clint Eastwood à ce discours fait en "faveur" de Mitt Romney serait absolument ridicule.
Bon, après ce préambule qui a tout du plaidoyer, revenons à l'essence même de ce blog: le cinéma!
"Breezy" est le troisième film de Clint Eastwood. Il a été réalisé en 1973, après "Un Frisson dans la nuit" et  "L’Homme des hautes Plaines".
Alors que l'Amérique, et le monde entier, pleure encore sur les amours tragiques d'Oliver Barrett IVe du nom et Jennifer Cavalleri ("Love Story" d'Arthur Hiller, 1970), Eastwood réalise un film sur l'histoire d'un homme quinquagénaire qui s'éprend d'une jeune hippie de 17 ans. Même dans les années 70 très "open", ce film a un léger parfum de scandale. Mais au final, c'est un film qui parle d'amour, un point c'est tout.



Edith Alice Breezerman dite "Breezy" est orpheline de père et de mère. Après l'obtention de son diplôme de fin d'études, elle entreprend de prendre la route. C'est une jeune hippie, joyeuse, aux propos teintés d'angélisme, non dénuée d'humour. Une vraie pipelette, qui a son mot à dire sur tout et sur tout le monde. Elle n'a pas la langue dans sa poche. Elle prône la liberté de vivre, de penser. Lui, c'est Frank Harmon. Agent immobilier, la cinquantaine. Il vient de divorcer et se retrouve complètement aigri, refusant tout attachement, de quelque nature que ce soit.



Ces deux-là vont se croiser. Au départ, on pense que Breezy (Kay Lenz)  est une petite arriviste qui tire profit de toutes les situations, mais on se rend rapidement compte qu'elle n'est que sincérité et spontanéité. Franky (William Holden), quant à lui représente l'American Way of Life vu par la droite conservatrice: un tantinet orgueilleux, riche, macho et vaniteux. Mais en réalité, c'est un homme plein de douceur, j'en veux pour preuve le moment où il sauve un chien d'une mort certaine. Scène du premier conflit entre Breezy et Franky comme elle l'appelle affectueusement.
Ils vont entamer une liaison, qui va les mettre face aux préjugés de la société, mais qui surtout va les mettre face à leurs propres désirs et attentes.



Une histoire d'amour sans gros cataclysme, mais d'une grande sincérité. Elle touche par sa simplicité apparente. Mais en fait, ce sont deux Amériques qui se rencontrent: celle plutôt libérée, utopiste et celle avide de pouvoir, d'argent et de conquêtes.
Ce film pourrait faire penser à une énième histoire de Lolita, mais étrangement, malgré la très grande différence d'âge qui sépare les deux personnages, on ne ressent aucun malaise contrairement à celui que l'on éprouve en lisant l'oeuvre de Nabokov ou en visionnant l'adaptation très controversée qu'en a fait Stanley Kubrick en 1962 (controversée, dérangeante, mais remarquable!).



C'est une histoire touchante, un peu mièvre diront certains. Mais il reste que ce film a un peu tout du conte de fées. Les images sont magnifiques, la réalisation sublime, les clichés liés au mouvement hippie soigneusement évités (mis à part le fait que Breezy ne porte pas de soutien-gorge). Même si Eastwood a fait nettement mieux plus tard dans le registre "histoire d'amour", avec "Sur la Route de Madison", "Breezy" doit être vu au moins une fois, parce qu'il est plein de charme. Et le charme, finalement, plus que la beauté, c'est l'ingrédient qui fait que l'on tombe amoureux.
Donc, regardez "Breezy" et tombez amoureux... la musique de Michel Legrand vous y aidera aussi!
Votre Cinécution

1 commentaire:

  1. Très bonne analyse. J'ajouterais que Breezy est probablement le film le plus subtil de Eastwood, et que les personnages sont beaucoup plus attachants que dans Madison County. c'est un sommet du cinéma américain des années 70, et il n'y a rien de mieux que le cinéma américain des années 70.

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