vendredi 27 mars 2015

FIFF 2015: trop plein d'amour et crise du désir


Lorsque que j’avais 9-10 ans, que ma cinéphilie était encore balbutiante, je regardais les films de Charlie Chaplin, Autant en emporte le Vent et Le Docteur Jivago. Quand on me demandait ce que je voulais faire plus grande, je répondais : Géraldine Chaplin ou Scarlett O’Hara. Si j’ai compris assez rapidement que Scarlett était une peste – mais bon, elle faisait quand même chavirer Clark Gable – je n'ai compris que quelques années plus tard pourquoi j’étais tellement fascinée par Géraldine Chaplin. Premièrement, elle est la fille de Charlie Chaplin. Comme beaucoup d’enfants dont un des parents aime le cinéma, j’ai grandi avec les films de Chaplin. Très jeune, mon papa nous a montré Le Dictateur, Le Kid ou encore Limelight. Je me rappelle avoir posé de nombreuses questions. Chaplin a donc indirectement participé à mon éducation. Deuxièmement, j’ai compris en m’intéressant à la filmographie de Géraldine Chaplin, qu’elle était une femme audacieuse, imprévisible. Toujours là où on ne l’attend pas.

Ce matin, elle est venue accompagner la projection de Sand Dollars, un film de la République Dominicaine, merveilleusement réalisé par Laura Amelia Guzman et Israel Cardenas.
 
 

Noeli est une très jeune femme dominicaine qui vend ses charmes à des touristes. Elle n’est vraiment une prostituée, mais elle profite des touristes, à qui elle joue la comédie de l’amour, pour leur soutirer de l’argent. Les choses se compliquent un peu lorsqu’elle fait la connaissance d’Anne. Ce qui change fondamentalement, c’est qu’Anne tombe éperdument amoureuse de Noeli.

Anne a un rêve : ramener Noeli en France. Elle lui procure un passeport et suffisamment d’argent pour que la jeune dominicaine la suive.
 
 

Sans poser aucun jugement sur la situation, les deux réalisateurs offre une vision très humaine de ce que peut être le tourisme sexuel. Sauf que là, l’amour fait son apparition. On n’est plus uniquement dans une situation de « blanc dominant ». Noeli, bien que profitant des largesses d’Anne, se sent bien et en sécurité avec elle. Si le pouvoir d’Anne est la richesse, celui de Noeli est la jeunesse. Un pouvoir dont elle abuse aussi, mais jamais à l’encontre d’Anne. Profondément pudique et nuancé, Sand Dollars est bouleversant. Mettant en lumière plusieurs sujets tabous – tourisme sexuel, amours saphiques, différences sociales – ce film aborde ces thèmes de façon délicate. Tandis qu’Anne attend une démonstration d’amour sincère de la part de Noeli, cette dernière attend la même chose, de Yeremi, son compagnon qu’elle fait passer pour son frère. Toutes deux attendront en vain.
 
 

Un vrai coup de cœur. Géraldine Chaplin sera à nouveau présente ce vendredi pour accompagner le film qui sera projeté à 12 :15 à Cap Ciné. Ne ratez pas une occasion unique de croiser cette femme merveilleuse que j’ai eu la chance de serrer fort dans mes bras. Un grand moment d’émotion dont je me souviendrai longtemps.

Autre coup de cœur de la journée, And They call it Summer de Paolo Franchi. Accompagné sur toute sa durée par la chanson de Bruno Martino E la Chiamano Estate, ce film italien de 2012, inédit en Suisse, nous propose d’entrer dans l’intimité de Dino et Anna. Couple de quadras fous amoureux l’un de l’autre, ils ne trouvent cependant pas le chemin de la sexualité. Dino est incapable de faire l’amour à sa femme, préférant les rencontres éphémères avec des prostituées ou des couples dans des soirées échangistes. Dino n’en est pas moins très amoureux. Tous deux souffrent de cette situation. Dino en vient même à retrouver les anciens amants de sa femme, dans l’espoir de comprendre comment ils vivaient l’intimité avec elle, leur proposant même de la recontacter et de reprendre leur liaison. Aucun n’accepte. La douleur qu’éprouve le couple est palpable et plonge le spectateur dans une tristesse absolue.
 

Le récit est surprenant tant il n’est pas linéaire. A nous, spectateur, de remettre les pièces du puzzle dans l’ordre. Cela ajoute du trouble au propos. Un sujet qui touche profondément, car tout un chacun a déjà connu une crise de désir, sans pour autant s’embourber à ce point dans un amour transgressif et malsain. En apparence, le couple est parfait. Cette vision extérieure idéale du couple est d’ailleurs accentuée par l’usage de filtres qui rendent l’image très onirique, légèrement floutée, des intérieurs très blancs, lumineux. Mais ce qui se cache sous la couette est autrement plus triste. La dichotomie devient forte lorsque des séances très crues de sexe s’intercalent.
 
 

C’est affolant de beauté et en même temps, d’une grande tristesse. Superbe. Merveilleusement filmé, Franchi a d’ailleurs été récompensé au Festival international du film de Rome en 2012, And They call it Summer pose plusieurs questions. L’amour fou permet-il de mettre tous ces désirs de côtés ? Est-ce que la sexualité est un fondement de la relation ? L’amour platonique se suffit-il à lui-même ? A nous de trouver nos propres réponses. Et je ne vous parle même pas de Jean-Marc Barr et Isabella Ferrari qui incarnent ce couple avec une élégance et une sensualité indescriptibles…et le tout en italien… Mamma mia !

 

ST/26.03.2015

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire