lundi 30 avril 2012

L'INVITE : Mathieu Fleury

Mathieu Fleury (photo de presse)
Que dire de Mathieu Fleury? Si ce n'est que c'est un peu le super héros des consommateurs. En sa qualité de secrétaire général de la Fédération Romande des Consommateurs (FRC), Mathieu Fleury prend la défense des consommateurs. Il les met en garde, les conseille. Ce n'est pas à l'avocat Mathieu Fleury que je m'intéresse aujourd'hui, mais au cinéphile. Il se définit lui-même plus  cinéphage que cinéphile, plus gourmand que gourmet. Un homme qui pendant plus d'une heure trente avait les yeux qui brillaient en me parlant des films qu'il aime (ou qu'il aime moins). Rencontre avec un homme qui n'a pas oublié ses racines jurassiennes et les valeurs terriennes qui s'y rattachent. Un homme à l'authenticité et à la sincérité rares.

Mathieu Fleury, si je vous dis le mot "cinéma" qu'est-ce qui vous vient spontanément à l'esprit?

Réalité augmentée. Oui, c'est ça. Le cinéma c'est un complément indispensable à la réalité. C'est en quelque sorte une lucarne supplémentaire, une vision de plus sur la réalité. Pour moi, c'est un compagnon de route. J'avoue être un boulimique, plus gourmand que gourmet. C'est vraiment une démarche tournée vers le plaisir. Je privilégie le plaisir aux questions formelles et techniques. Déjà le fait d'entrer dans le cinéma est un plaisir en soi. J'avoue également que je suis bon public.

Un compagnon de route qui vous accompagne depuis quand?

Depuis l'enfance. Mes parents étaient de bons connaisseurs et très exigeants avec les films qu'ils voyaient. Ils avaient un côté très "ARTE", très "ciné-clubs". Ils connaissaient très bien le cinéma de leur génération. Avec mon père, je regardais des Fellini par exemple, à la télévision. Je ne comprenais pas tout, mais il y avait quelque chose qui me fascinait et qui me faisait découvrir une autre facette de mon père. Ma mère était très fine et mon père s'extasiait devant les femmes à la féminité opulente de Fellini. J'ai très peu vu de films d'enfants dans ma jeunesse. Les "classiques" pour enfants, je ne les ai découverts que plus tard. Par contre, je me souviens de la première fois où je suis allé au cinéma. C'était pour "Le Chat qui vient de l'espace". J'avais le sentiment d'être un "grand", c'était comme avoir franchi un cap. J'étais dans une salle de cinéma, avec d'autres gens qui regardaient la même chose que moi. Encore aujourd'hui, je ne vais presque jamais au cinéma tout seul. J'ai besoin de partager. Après la séance, j'aime bien prendre le temps de discuter avec les gens qui ont vu le même film que moi. On a vécu quelque chose ensemble. Aujourd'hui, en tant qu'adulte, c'est toujours le même émerveillement. Lorsque l'on arrive à oublier toute la mécanique du film, tout l'aspect technique, je trouve ça fascinant et je suis très admiratif de cette représentation du "faux réel".



Qu'est-ce qui vous touche tout particulièrement?

La musique. Lorsque la musique est utilisée intelligemment. Dans les films de Tarantino par exemple. Je trouve que Tarantino sait très bien utiliser la musique. Dans Jackie Brown par exemple. C'est fabuleux! Ou alors Amélie Poulain. J'essaie toujours de retrouver les musiques de film. Je les écoute aussi. J'écoute beaucoup de musique en général. J'utilise la musique pour sublimer les instants de la vie. J'essaie toujours d'écouter la musique qu'il faut au moment il faut. Si j'ai besoin d'énergie ou alors si j'ai besoin de me calmer.
Sinon, je suis sensible au rythme du scénario ou à la photo, mais je ne théorise pas. La photographie d'un film me touche, sans que je me rende vraiment compte de ce qui me touche. Ce n'est qu'après, en lisant des critiques par exemple, lorsqu'un élément est souligné, que je me dis :"Oui, c'est ça.".  Pour ce qui est du scénario, j'apprécie les films où l'on rit et où l'on pleure. Un bon exemple, c'est Intouchables. Là, je dis simplement: "Merci!".

Mathieu, vous avez 3 enfants, âgés entre 8 et 3 ans. Quels sont les films que vous leur proposez?

Alors, ils ont déjà leurs propres goûts! Ils aiment bien les films de Pixar par exemple. Mais ces temps, ce sont surtout les "Kung-Fu Panda" que l'on regarde. Ils sont aussi très drôles pour les adultes. C'est toujours un moment privilégié en famille. On se met au lit et on regarde un DVD.
Je me suis aussi rendu compte que le cinéma a beaucoup d'impact sur les enfants. Lorsque mon fils a pleuré en regardant "L'Âge de Glace", au moment où l'on croyait que le tigre était mort, moi ça m'a fait quelque chose. C'était la première fois que mon fils pleurait pour quelque chose qui était extérieur à lui. D'où l'importance d'accompagner les enfants, de regarder les films avec eux, pour pouvoir, le cas échéant les sortir du film et leur dire: "Ce n'est qu'un film!". Jamais je ne laisse mes enfants regarder un film tout seuls. Malgré cette force que peut avoir le cinéma sur les enfants, cela leur permet de découvrir des sentiments et de s'enrichir émotionnellement, mais toujours en étant accompagnés. Je suis aussi très attentif aux âges recommandés. Je ne cherche pas particulièrement à les sur-protéger, mais j'estime qu'on doit leur tenir la main. Je n'hésite d'ailleurs pas à stopper le visionnage d'un film lorsque je me rends compte que les émotions sont trop fortes. Mes enfants regardent aussi des films avec leurs grands-parents, mais là, ce sont surtout les films de Chaplin.

Vous parlez beaucoup d'émotions. Pour vous, c'est un mot indissociable du cinéma?

Absolument. C'est surtout un lien entre les gens. Je ne vais que très rarement au cinéma tout seul, parce que ce que j'aime dans le cinéma, c'est l'après-cinéma. Ce sont les discussions qui en découlent. On peut ne pas avoir les mêmes goûts avec les amis avec qui l'on va au cinéma, il y aura toujours des émotions qui nous relient. Les films résonneront différemment d'un individu à l'autre, en fonction de son parcours de vie. On discute, on échange, on a des goûts et des opinons qui différent, mais cela n'entamera jamais la relation de base. Et tout est une démarche qui tend au plaisir. Même regarder ce que certains considèrent comme un "mauvais" film peut procurer du plaisir. Actuellement, je recherche des films qui me procurent de l'harmonie, qui sont apaisants et drôles. Oui drôles. Qu'est-ce que c'est difficile de faire rire! C'est tout un art!

Justement Mathieu, le film pour rire, c'est lequel?

"Le Dîner de Cons". J'ai beaucoup ri. Je trouve qu'il est très bien écrit. Et Francis Huster qui d'ordinaire est plutôt sinistre, là, il part dans un fou rire. J'adore. Et puis tous ces films où on se sent bien après les voir vus. Sinon, il y a encore un film complètement délirant, "Woody et les robots". Le délire c'est très difficile à maîtriser, mais quand ça va jusqu'au bout de l'idée et que c'est totalement assumé, c'est délicieux.

Restons dans les émotions, le film pour pleurer?

"Tandem" de Patrice Leconte. Un film qui parle d'une belle amitié entre deux hommes. Ou alors "Le premier jour du reste de ta vie" avec Zabou Breitman et Jacques Gamblin. Très touchant. Et bien sûr Clint Eastwood avec "Sur la route de Madison" ou "Gran Torino". Avec "Gran Torino", tu te fais avoir. Eastwood t'attrape au contour et tu lui dis: "Merci. Merci d'avoir été plus malin que moi!". Sinon, il y a aussi ce film avec Cameron Diaz où elle est mère de deux fillettes, une atteinte d'un cancer et l'autre donneuse potentielle qui pourrait sauver sa soeur. Une histoire un peu complexe. Mais il y a une belle musique d'Edwina Hayes, "Feels like Home" qui m'a touché (et là Mathieu Fleury de sortir son Iphone et de me faire écouter la chanson...). Oui, je n'ai pas honte de dire que cette grosse mécanique hollywoodienne m'a touché.



Continuons sur notre lancée... le film pour séduire, Mathieu Fleury?

Clairement "Le Grand Bleu" ou "Top Gun", bon ça c'était quand j'étais ado. Sinon, "Roméo et Juliette" de Baz Luhrmann et cette magnifique rencontre autour d'un aquarium. Oui, à ce moment-là, tu y crois!! Mais aujourd'hui, pour séduire, je ne vais plus au cinéma, d'ailleurs, je ne sais plus comment faire! Non, aujourd'hui, j'emmène mon épouse au restaurant et on parle.

Du tac au tac Mathieu, le dernier film que vous ayez vu?

 "Les infidèles" de Jean Dujardin et Gilles Lellouche

Votre film culte?

 "The Big Lebowski" ou "No Country for old Men". J'adore les frères Cohen.

Votre acteur/actice préféré-e?

Jacques Gamblin. Il est fin et dégage beaucoup d'émotion. Justement à ce propos, je suis admiratif du métier d'acteur. Malgré tout ce qui les entoure (équipe technique, etc...) ils arrivent à faire passer des émotions ou à retranscrire des scènes de vie. Vraiment, je suis admiratif.
Il y a aussi Tom Hanks (et ce n'était pas gagné pour lui!), spécialement dans "Philadelphia". Là, encore un exemple où la musique a beaucoup d'importance.

Des répliques cultes?

Non, pas spécialement. Mais des scènes cultes auxquelles je me réfère de temps en temps. Mais si je prends l'exemple de "La Vérité si je mens". Incroyable le nombre d'expressions qui sont entrées dans le langage commun. Et dans les scènes cultes, il y a aussi celle dans "Amélie Poulain" où le souffleur depuis la bouche d'égout lui souffle ce qu'elle doit dire au vendeur de fruits et légumes. Ce film, c'est un anti-dépresseur de première classe! Il devrait être délivré sur prescription et remboursé par les caisses-maladie! Il représente un peu tout ce que l'on aimerait être. Et si on prend un autre exemple, dans "Zorba, le grec", ma femme est d'origine grecque, et bien quand on n'arrive plus à exprimer ses sentiments, et bien, on danse. On aimerait pouvoir appliquer cela dans la vie quelques fois.

Mathieu, vous lisez les critiques de cinéma?

Oui et non. Je les lis après avoir vu le film en général. Je préfère d'abord aller au contact du film. Et après, je veux bien qu'on me prenne par la main, qu'on me donne certaines clés.

Un dernier mot ?

Ne pas perdre le plaisir!



Propos recueillis le 30 avril 2012 / Cinécution





1 commentaire:

  1. J'aime bien sa conception du cinéma. Je trouve que sans les films et les séries, beaucoup de gens s’ennuieraient totalement. En plus, dans mon cas, ce sont les séries qui me donnent souvent la motivation d'avancer.

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