Oui, le monde est en crise. La
nature reprend ses droits. L’homme est mis face à sa cupidité. Le mot
solidarité semble avoir disparu des dictionnaires occidentaux. A priori, pas
beaucoup d’espoir. Sauf que le Festival International de Films de Fribourg nous
propose d’entrer en résistance !
Quelques petits remèdes sont
proposés au travers des films sélectionnés dans la section Décryptage. Ainsi,
du SDF intrigant de Borgman d’Alex van
Warmerdam en passant par Henry, le père de famille cultivateur d’OGM de At Any Price de Rami Bahrani, sans oublier des
documentaires comme Inequality for all
de l’américain Jacob Kornbluth, nous apprendrons comment nous extraire de
crises économiques, personnelles, dans une société occidentale où le
« chacun pour soi » prévaut.
Cette section possède aussi son petit
bonheur : Finding Vivian Maier
de John Maloof et Charlie Siskel qui lève le voile sur plus de 30'000 négatifs
jamais développés de la photographe Vivian Maier. Une exposition à la Bibliothèque
cantonale universitaire lui fera écho.
Une compétition internationale de haut vol
La compétition internationale de
longs métrages promet d’être riche en émotions. Alors que nous découvrions le
Eric Rohmer japonais en la personne de Koji Fukada et son Au revoir l’été,
nous retrouverons avec bonheur le multi lauréat de l’an passé Wang Bing. Le
cinéaste chinois nous plonge, avec ‘Til Madness Do Us Part
dans un asile psychiatrique où une cinquantaine d’hommes vivent enfermés. Les
pathologies psychiatriques côtoient les mal-aimés de la société. S’ils ne sont
pas fous à l’entrée, leur internement se chargera de faire naître la
folie. Cette magnifique compétition
verra aussi projeté le sublime Manuscripts Don’t Burn de
l’extraordinaire cinéaste iranien Mohammad Rasoulof. Voir ce film est une
obligation ! Autre film iranien en compétition, le terrifiant Fish and Cat de Shahram Mokri. Un plan séquence de plus de
2 heures ! L’expérience doit être vécue !
Le FIFF s’affranchit une
nouvelle fois de l’impératif de réunir des premières internationales, en
privilégiant la diversité et la qualité. Fictions et documentaires se
rencontrent, se complètent, se répondent.
Nouveauté, une compétition
internationale de courts métrages verra s’affronter 18 courts métrages issus de
15 pays, dont le Bhoutan et l’Iraq. Des pays qui ont rarement accès la
distribution internationale. Ces 18 courts métrages seront projetés en trois
programmes.
Catastrophes chimiques et naturelles, censure et résistance
Dès l’ouverture, avec Bhopal : A Prayer for
Rain, le ton est donné. La section cinéma de genre donnera la parole
aux films d’actions, aux documentaires avec comme seul mot d’ordre :
survivre ! Une section qui fera la part belle aux films sud-coréens. C’est
effectivement dans ce pays que la majorité des films catastrophe sont
actuellement tournés. Nous aurons l’occasion de quitter la Corée du Sud pour
nous envoler vers le Japon avec un documentaire possédant une énorme force
poétique, The Horses of Fukushima,
puis d’un bond nous serons en Russie, pris au piège d'un métro moscovite avec Metro.
The Horses of Fukushima, Yoju Matsubayashi |
La résistance passe quelques fois
par sa propre mise en danger. Tel est le cas pour les cinéastes iraniens. Une
magnifique section hommage leur est consacrée. Particularité de cette sélection,
les films ont été choisis par les plus grands réalisateurs iraniens. A force de
persévérance, de mise en confiance, Thierry Jobin a su trouver les mots pour
convaincre de grands noms du cinéma iranien tels que Mania Akbari, Asghar
Farhadi, Mohammad Rasoulof ou Jafar Panahi (pour n’en citer que quelques-uns) de
choisir parmi la riche production cinématographique iranienne, leurs films
préférés. Ce sera l’occasion de découvrir des films rares, privés de
distribution notamment en raison de la censure. Plus qu’un plaisir cinéphile, un acte
citoyen. Le cinéma iranien, comme souvent mentionné sur ce blog, est un des
plus beaux au monde. Des films engagés aux qualités artistiques indéniables.
Cette sélection sera d’ailleurs reprise par le Festival International du Film d’Edimbourg, par la Cinémathèque de Toronto, qui
complètera le programme, et aussi, mais partiellement, par la Cinémathèque
Suisse.
The Runner, Amir Naderi |
Jury 5***** et gourmandises cinéphiles
C’est un jury impressionnant qui
aura la lourde tâche de décerner le Regard d’Or de cette 28ème
édition du FIFF. Le québécois Sébastien Pilote (et son extraordinaire Le Démantèlement) siègera aux côtés
d’Alejandro Fadel (vu l’an passé avec Los Salvajes), Erik
Matti (l’occasion de voir On the Job en
séances de minuit) et de Daniela Michel, qui dirige depuis dix ans le Festival
International de Cinéma de Morelia au Mexique. Cerise sur le gâteau, Jerry
Schatzberg, grand prix du Jury à Cannes en 1973 avec L’Epouvantail
sera également membre du jury.
Les séances de minuit, ainsi que
les films hors compétition permettront aux cinéphiles les plus chevronnés de se
faire plaisir « encore un petit peu plus ». Le bonheur de pouvoir
voir le terrifiant dernier film de Kim Ki-duk, Moebius ou encore de découvrir le film préféré de
Quentin Tarantino en 2013, Big Bad Wolves. Et
si vous n’êtes pas encore rassasiés, plongez dans Boogie de Gustavo Cova, un film d’animation argentin cynique
est irrévérencieux. Pour ceux qui souhaitent comprendre ce que le cinéma 3D
apporte (ou enlève, c'est selon) au cinéma traditionnel, une vision de 3x3D réalisé
conjointement par Jean-Luc Godard, Peter Greenaway et Edgard Pêra, s’impose. Pour ma part, en dehors de tous les films précités, et certainement encore plein
d’autres, je ne résisterai pas à l’appel de Historias Extraordinarias
de Mariano Llinàs.
Quant aux
Frères Dardenne, grands invités de cette édition du FIFF, ils seront
présents lors du premier week-end du festival qui se tiendra du 29 mars au 5
avril prochains.
Maintenant, ne reste plus qu’à
répondre à une seule question : Comment vais-je faire pour tout voir ?
ST / 12.03.2014
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