Andrew, qui n’a pas encore 20
ans, a intégré un des plus prestigieux conservatoires de musique de Manhattan.
Son rêve, devenir le nouveau Buddy Rich, batteur de jazz totalement
autodidacte, reconnu pour sa technique et sa vitesse d’exécution. Il est actif
dans l’orchestre de 2ème classe de son conservatoire et son objectif
est d’être repéré par Fletcher, un professeur connu pour sa recherche constante
d’excellence, réputé féroce et intraitable, qui dirige l’orchestre phare du
conservatoire.
Andrew ne compte pas ses heures
de travail. Finalement, Fletcher l’engage dans son orchestre. Commence alors
pour Andrew un véritable chemin de croix. La relation entre le professeur et
son élève est plus qu’ambiguë. Andrew, entre fascination et répulsion, se soumet
à toutes les exigences de Fletcher, allant jusqu’à mettre à vif ses doigts à
force d’entraînements. Fletcher, dont les méthodes d’enseignements sont plus
que controversées, aligne les insultes, les humiliations, les manipulations
psychologiques pour tirer le meilleur de ses élèves.
Fletcher fait immanquablement
penser au Sergeant Hartmann du Full Metal Jacket de
Stanley Kubrick. Il parle fort, engueule ses troupes, met leur virilité en doute
en permanence. Comme dans le Kubrick, les effets de ce genre de traitement ne
se font pas attendre. Glaçant. Eprouvant.
Là où le film de Damien Chazelle
est ambigu, c’est que l’on ne sait pas vraiment s’il dénonce ce genre de
pédagogie ou s’il en fait l’apologie. En effet, au final, bien que certaines
séquences soient à la limite du supportable, il s’avère qu’Andrew excelle. Ecœuré,
en colère, mais diablement virtuose.
Les champs et contre-champs qu’utilisent
Chazelle accentuent l’impression de combat entre les deux musiciens. On a le
sentiment d’être sur un ring de boxe. On ne sait pas, jusqu’à la dernière
minute lequel des deux sera mis KO. On hésite longuement, tant le film suit
finalement une trame assez classique du film d’apprentissage : espoirs,
efforts, abandon, reprise de l’effort, désillusion. La lourdeur de certains
plans est accentuée par l’ambiance mordorée du studio dans lequel l’orchestre
répète. Quels contrastes !
Les solos de batterie donnent à
eux seuls un rythme infernal au film. Le rythme cardiaque s’accélère, le
souffle devient haletant. On souffre avec Andrew. Vraiment. Mais en même temps,
on se dit qu’il est un peu stupide : libre à lui de ne pas entrer dans ce jeu
de soumis-dominant. Manifestement, adepte du masochisme, il continue à se
soumettre aux caprices extravagants de son professeur, jusqu’à délaisser
complètement sa vie personnelle, mettant la jeune femme dont il est amoureux
sur le carreau.
Quant au personnage de Fletcher,
peut-on réellement lui reprocher sa recherche d’excellence ? Celui dont on
imagine la carrière de musicien soliste inachevée et quelque peu ratée, ne
fait-il pas un transfert sur ses élèves les plus doués ? Sa quête du
nouveau Charlie Parker – quête jusque-là vaine – ne le pousse-t-elle pas à
franchir des limites que certains considèrent comme inacceptables, mais qui ne
sont que le reflet de la passion absolue ? Il faut souffrir pour devenir grand,
serait le leitmotiv de ce film.
Miles Teller, qui incarne Andrew,
et J.K. Simmons, Terence Fletcher, portent le film sur leurs épaules. Leurs
performances incroyables, nous font oublier tous les autres rôles qui
traversent le film.
Prix du public dans de nombreux
festivals (Deauville, Sundance, Calgary), Grand Prix du Festival de Deauville,
Prix du jury au dernier Festival de Sundance, loué par la critique
internationale, Whiplash est un de
ces films qui fait l’unanimité entre le milieu professionnel et le public. C’est
suffisamment rare pour être relevé et pour vous inciter à aller le voir. Ce
film est un coup de fouet !
ST/ 29.12.2014
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