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mercredi 11 décembre 2013

LA VENUS A LA FOURRURE - Roman Polanski - 2013



Vous rêviez secrètement d’être enfermés dans un théâtre avec la sublime Emmanuelle Seigner ? Son mari, Roman Polanski, vous offre ce cadeau ! 

Thomas (Mathieu Amalric), metteur en scène et auteur, vient de passer une journée complète à auditionner des comédiennes pour la pièce qu’il est en train de monter. Il se plaint au téléphone de n’avoir eu affaire qu’à de mauvaises candidates, dont aucune n’avait l’envergure, le mystère pour incarner l’héroïne principale. C’était sans compter sur l’irruption de Vanda (Emmanuelle Seigner). 

Tout d’abord réfractaire à l’auditionner - elle incarne tout ce qu’il déteste, en étant un peu nunuche, vulgaire et prête à tout - il se retrouve contraint et forcé de lui laisser sa chance. C’est alors que la métamorphose s’opère. Non seulement Vanda porte le même prénom que son héroïne, mais les efforts de la jeune femme – elle a apporté des costumes, connaît toutes les répliques par cœur – sont salués, et en plus, elle semble habitée par le personnage et comprend parfaitement tous les tenants et aboutissants de la pièce. 

L’audition prend un tour surprenant et tout en se prolongeant, se mue en un jeu de séduction qui passe par la domination évidente de Vanda. Thomas est sous l’emprise de cette Vénus plus vraie que nature. Une attraction qui vire rapidement à l’obsession.

 
Adapté d’une pièce de David Ives, elle-même adaptée du livre de Sacher Masoch, La Vénus à la Fourrure est un coup de génie. Placer l’intégralité de l’intrigue, non pas dans une salle de répétitions lambda, mais à l’intérieur d’un théâtre, ça change tout ! Les déplacements entre la scène et la salle, inclus les coulisses, donnent un véritable rythme au film. Les restes du décor du spectacle précédant, La Chevauchée fantastique (en comédie musicale !), notamment d’immenses cactus à l’allure de colonnes antiques, ajoutent un côté sordide à la situation. 


 La psychanalyse a inventé le mot masochisme, en faisant référence aux récits de Sacher Masoch, lesquels présentent souvent des femmes dominatrices ou sadiques. Contrairement au roman de l’auteur autrichien, où il y a une mise en abîme puissante – Confessions d’un suprasensuel  émaillant une bonne partie du récit – le film de Polanski est plus conventionnel dans sa forme. La trame est linéaire et se déroule presque en temps réel. 

Toutefois, l’apparence de Vanda semble, à un moment donné, changée. Sa coiffure, son maquillage... Le film commence alors à distiller un certain trouble. On a le sentiment d’aller vers quelque chose d’irréel et c’est au final ce sentiment qui l’emporte. Les frontières entre Vanda la comédienne et Vanda l’héroïne sont de plus en plus ténues. Les rôles s’inversent, les rapports de force également. 

 
L’érotisme de ce film réside, bien plus que dans le propos, dans la présence quasi mystique d’Emmanuelle Seigner. Attention, je ne suis pas en train de dire que Mathieu Amalric n’est qu’un faire-valoir, non, il est absolument remarquable –comme à son habitude dirais-je - mais la sublime muse de Polanski porte quasi à elle seule ce film jouissif. Tour à tour pétillante, puis séductrice, puis carnassière à l'image d'une déesse vengeresse, elle insuffle une sensualité impressionnante. De plus, à eux deux, ils représentent pratiquement toute la filmographie de Polanski : tout d’abord cette robe qui rappelle Tess, puis ce couteau qui fait remonter le souvenir de Rosemary’s Baby, ou cette scène de maquillage identique à celle de  Françoise Dorléac et Donald Pleasence dans Cul-de-sac, sans oublier la danse finale qui émoustillera son monde en ramenant à celle de Lunes de Fiel.
 
Polanski livre un film insolent, tragi-comique, et au final profondément jubilatoire… et féministe ! « Et le tout Puissant le frappa….Et le livra aux mains d’une Femme »...  tout un programme!


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