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samedi 20 octobre 2012

LE CINEMA INDEPENDANT AMERICAIN

Appelé outre-atlantique "american indie cinema", le cinéma indépendant américain est né d'une sorte de rébellion dans les années 50 et 60. Un refus de coller aux diktats hollywoodiens, aux codes et mythologies propres aux grands studios. La volonté d'une poignée de cinéastes de s'affranchir de ces obligations et d'une certaine censure artistique donnera naissance à un des mouvements cinématographiques le plus innovant qui soit. Il y a là une vraie création : quelle soit visuelle ou scénaristique. Des films totalement libres, teintés bien souvent de nostalgie et d'absurde. C'est un cinéma expérimental. Relevons cependant qu'Orson Welles défendait avec violence son indépendance artistique au sein des studios à la même époque.

Au début cantonné à la région de New-York (très éloigné de la Californie hollywoodienne) et plus appelé cinéma underground que cinéma indépendant, c'est avant tout un mode d'expression, plus qu'un genre. Évidemment, lorsque l'on pense cinéma indépendant, on a des clichés, des préjugés, ou bien alors on attend certaines choses : des cadrages tremblotants, caméra à l'épaule, des décors naturels, des acteurs inconnus, des films low budget dont on se fiche un peu de la trame, se concentrant sur la forme plus que sur le fond. Mais en y regardant bien, si l'on prend quelques exemples de cette première période, on se rendra compte que le fond est tout aussi important que la forme.


"The Chelsea Girls"Andy Warhol -1966
 
John Cassavetes, et son "Shadows" en 1959, aborde de façon brillante le racisme au travers d'une histoire d'amour entre un homme blanc et une jeune femme métis. Une plongée dans le New-York de la fin des années 50, sa culture jazz et contemporaine (magnifique immersion au MOMA avec un des protagonistes). Le fond y est et la forme aussi. "Shadows" s'affranchit totalement des codes hollywoodiens : tout est filmé en décor naturel. Les acteurs sont spontanés et libres. La musique est largement improvisée, notamment par Charles Mingus. Si vous ne l'avez pas encore compris, c'est un bijou! Cassavetes cédera aux sirènes hollywoodiennes et fera deux films sous le joug de la Paramount, mais en 1968, avec "Faces", il retournera au cinéma indépendant (pour notre plus grand plaisir), car il refuse de faire appel à des ressources financières qui pourraient altérer sa création artistique. En découleront les chefs-d'oeuvres que nous connaissons tous : "Husbands", "Une femme sous influence" ou "Gloria".


"Shadows" John Cassavetes - 1959

Jusqu'aux années 70, le cinéma indépendant est considéré comme un laboratoire, non seulement un milieu où tout est permis, mais également un milieu où toutes les histoires qui ne sont pas racontées par Hollywood peuvent être mises en images. C'est un cinéma intimiste, politique, engagé,  mû par une seule envie: faire du cinéma!
Dans cette mouvance très conceptuelle des années 70, on peut aussi mettre en avant "Ciao! Manhattan" de John Palmer et David Weisman. Je suis dans l'impossibilité d'avoir un regard objectif sur ce film, tant je l'aime. Si vous voulez en savoir plus sur "Ciao! Manhattan", un article lui a été consacré sur ce bog. Pour le lire, c'est ici.

"Ciao! Manhattan" Jonh Palmer, David Weisman - 1972
 

Dès les années 90, le cinéma indépendant se fait une vraie place. Il circule, même via de petite filières, mais il circule. Il devient une référence: j'en veux pour preuve "Reservoir Dogs" de Quentin Tarantino qui révolutionne le genre.

"Reservoir Dogs" Quentin Tarantino -1992

 
Il est clair qu'ils touchent principalement un public de cinéphiles dans un premier temps, mais au fur et à mesure que les années passent, les films émergeant du circuit indépendant élargissent le spectre de leurs spectateurs. La liste ci-dessous, qui n'est pas exhaustive, mais qui est INDISPENSABLE, démontre que le cinéma indépendant s'est fait une place, s'est constitué un public. Ses thématiques, proches des gens ordinaires, touchent. Pas toujours facile d'accès, parce que d'une part encore toujours un peu distribué de manière confidentielle, et d'autre part, une approche artistique qui demande un effort de la part du spectateur. Le cinéma indépendant américain n'en est pas moins un cinéma reconnu et apprécié.
 
- "Shadows" de John Cassavetes - 1959
- "Faces" de John Cassavetes - 1968
- "Pink Flamingos" de John Waters- 1972
- "Ciao! Manhattan" de John Palmer et David Weisman - 1972
- "Rambo" de Ted Kotcheff - 1982 (qui l'eût cru?)
- "Blue Velvet" de David Lynch - 1986
- "Barton Fink" de Joel Cohen - 1991
- "Reservoir Dogs" de Quentin Tarantino - 1992
- "Pulp Fiction" de Quentin Tarantino - 1994
- "Clerks" de Kevin Smith - 1994
- "Gummo" d'Harmony Korine - 1997
- "Boogie nights" de Paul Thomas Anderson - 1997
-  "American History X" de Tony Kaye - 1998
- "The big Lebowsky" de Joel et Ethan Cohen - 1998
- "Pi" de Darren Aronofsky - 1998
- "Le Projet Blair Witch" de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez - 1999
- "Virgin Suicides" de Sofia Coppola - 1999
- "Requiem for a dream" de Darren Aronofsky - 2000
- "Little Miss Sunshine" de Jonathan Dayton et Valerie Faris - 2006
- "The Savages" de Tamara Jenkins - 2007
- "The Wrestler" de Darren Aronofsky - 2008
- "Black Swan" de Darren Aronofsky - 2010
- "Take Shelter" de Jeff Nichols - 2011
- "Bellflower" d' Evan Glodell -2011 
 
  
"Pink Flamingos" John Waters- 1972


C'est donc une liste non-exhaustive qui se base principalement sur mes propres goûts. Mais, sachez que le Festival de Sundance est entièrement consacré au cinéma indépendant et que les films lauréats trouvent régulièrement le chemin des salles européennes, pour notre plus grand plaisir.
Notons également que le cinéma indépendant ne pourrait exister sans la grande industrie hollywoodienne. Il en est, en quelque sorte, la réponse libre, le contre-courant honnête et artistique de la grosse machine californienne. Malgré tout, de grands cinéastes, Stanley Kubrick ou Paul Thomas Anderson, ou même Christopher Nolan et son "Inception", ont réussi à imposer leur vision du cinéma, leur art si particulier et innovant de filmer, au sein même de la grande industrie.

Depuis une dizaine d'année, les films indépendants sont de plus en plus projetés dans les salles hors circuit indépendant et remportent régulièrement des prix dans les plus prestigieux festivals. Le cinéma indépendant s'est démocratisé et ne parle plus uniquement à une bande d'illuminés fascinés par la culture underground.
 
Votre Cinécution
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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