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dimanche 11 octobre 2015

LE TOUT NOUVEAU TESTAMENT - Jaco Van Dormael - 2015


Dieu est un salaud et il habite Bruxelles. Il est marié, violent, alcoolique, et a une fille de dix ans dont personne ne connaît l’existence. C’est là le postulat de départ, un brin blasphématoire, donc alléchant, du nouveau film de Jaco van Dormael. Sauf que ça se gâte. Le film ne tient aucune promesse, surfe sur des vagues de bons sentiments qui feraient pâlir de jalousie les plus grands spots de pseudo-coaching personnel.

Dieu - Benoît Poelvoorde, détestable à souhait -  passe ses journées à boire devant son ordinateur, à créer le bronx dans la vie de tous les humains, érigeant des règles à la con – que l’on a manifestement attribuées à tort à un certain Murphy – jouissant du malheur de ses créatures. Père de famille violent, eh oui, « JC » a une petite sœur, Ea, et mari tyrannique, Dieu est la personne la moins fréquentable qui soit. Ea, par vengeance, et peut-être aussi dans l’espoir de sortir de l’ombre de son célèbre grand frère, balance toutes les dates de décès. Chacun connaît désormais son décompte précis jusqu’à sa mort. Elle quitte l’appartement duquel elle n’est jamais sortie, dans l’espoir de réécrire un tout nouveau testament, susceptible de changer la face du monde. Pour ce faire, elle a besoin, comme son illustre frangin, de suiveurs, d’apôtres. Elle pique six noms au hasard dans la cartothèque géante de son papa. C’est parti mon kiki !

Ces apôtres des temps modernes – distribution exceptionnelle s’il en est, mêlant Catherine Deneuve, François Damiens entre autres – ont tous un point commun : ils sont malheureux dans leur vie respective. Terreau fertile pour être illuminé, je ne vous apprends rien. Chacun suivra donc la petite Ea dans sa quête de spiritualité universelle. Le leitmotiv : aimer, mais surtout être aimé. C’est, selon Saint Van Dormael, la seule planche de salut. Ce sont tous de doux idiots, avec une capacité de réflexion proche de celle de la moule… sans la frite… ce qui rend le truc tout de suite un peu moins fun. Van Dormael pousse le mauvais goût jusqu’à mettre Catherine Deneuve dans les bras d’un gorille ( !), référence extrêmement maladroite au sublime Max mon Amour du japonais Oshima.
 
 

D’autre part, chaque disciple possède sa propre musique intérieure, ce qui en soi aurait pu être d’une poésie remarquable, si ces musiques n’avaient été tirées de « la musique classique pour les nuls »… Toutes les musiques des pubs pour les assurances de ces dix dernières années y passent… Bien sûr, elles sont belles, mais bon… on aurait pu faire preuve d’un peu plus de réflexion et d’originalité, non ?

Bref, si le film n’est pas complètement dénué de poésie, certaines séquences sont jolies, même si elles transpirent Le fabuleux Destin d’Amélie Poulain à des kilomètres – voix-off, retour sur l’enfance tragique, etc… - s’il possède par moment ce qui fait que l’on aime le cinéma belge, à savoir une certaine absurdité propre aux résidents du pays d’origine de Magritte, il n’en reste pas moins que Van Dormael finit l’auto-sabotage dans les cinq dernières minutes. La fin ? Une catastrophe. Mais vraiment ! Tant sur le fond que sur la forme.
 
 

On retiendra surtout la petite Ea, Pili Groyne, Yolande Moreau, toujours impeccable dans les rôles de grande naïve et peut-être, sans rien dévoiler, que la femme est l'avenir de l'homme, selon la formule chère à Louis Aragon.
Jaco Van Dormael est un cinéaste peu prolifique : quatre films en 24 ans. Mais si c'est pour nous livrer un film aussi médiocre, il peut rester rare.



 

ST / 10 octobre 2015